L’activité solaire de Soitec est dans une situation très critique car les projets de fermes solaires annoncés en 2011 avec SDG&E et Tenaska (~ 300MW au total), ayant conduit à la construction de l’usine de San Diego (près de 300 employés), sont définitivement annulés. (annonce faite le 22 décembre)
Les travaux qui auraient dû commencer début 2013 ont été sans cesse repoussés pour aboutir à cet échec. Malgré les demandes d’explications répétées des élus CGT et de l’expert SECAFI du Comité d’Entreprise (CE) durant toute cette période, la direction s’est contentée de nous informer à minima de la situation en invoquant les soi-disant limites des prérogatives du CE de Bernin (Soitec SA) alors que ce site est le site corporate du groupe et que toutes les activités y sont donc représentées.
Dans son tract de rentrée du 25/09/14 intitulé « Une rentrée sociale déjà compliquée… », la CGT Soitec écrivait :
Ensuite lors de cette réunion, la direction n’a pas été en mesure de répondre aux craintes légitimes des élus CE CGT concernant l’activité solaire et la finalisation de la seconde moitié du contrat aux US à réaliser impérativement ces prochaines semaines après le retrait de Tenaska en avril dernier (manque à gagner de 150MW ~ 300M€ de chiffre d’affaire). A ce jour, notre trésorerie fragile ne nous permet d’être « pro actif » sur cette centrale et nous met dans une situation de dépendance vis-à-vis d’un éventuel financement. Même si nous espérons rapidement qu’une solution satisfaisante sera trouvée, nous ne pouvons que nous interroger sur les conséquences des négociations en cours alors qu’une usine de 240 personnes à San Diego est en place prête à produire. Au-delà de la pérennité de cette activité qui a concentré les investissements ces dernières années, quelles seraient les conséquences d’un échec à l’échelle du groupe ? La direction nous doit plus de transparence.
Ce chapitre nous a valu d’être convoqués par la direction et d’être qualifiés d’ « irresponsables » alors que nous ne faisions que poser des questions légitimes sur la base d’informations non confidentielles. Au-delà de la problématique posée par la mise sous pression de notre syndicat, la CGT estime que l’irresponsabilité serait aujourd’hui de continuer dans une telle opacité et de ne pas reconnaître l’échec de la stratégie actuelle alors que des centaines d’emplois sont menacés sur tous les sites du groupe dont Bernin.
Fin 2009, la diversification de Soitec dans le secteur des énergies renouvelables était annoncée. Rapidement l’ampleur des investissements dans ce secteur ultra concurrentiel de l’énergie posait question et ne nous semblait pas en adéquation avec la taille et la situation du groupe. Investir plusieurs centaines de millions d’euros sans bénéficier des garanties de finalisation des principaux contrats nous conduit dans la situation actuelle.
Sur la base des informations et analyses fournies par l’expert du CE, la CGT communique et revendique depuis 2013 l’adossement de cette activité à un gros acteur du secteur de l’énergie afin de consolider financièrement cette phase de promotion de la technologie et pour sécuriser l’ensemble des activités du groupe (microélectronique en particulier). L’objectif est de se recentrer sur notre cœur de métier à savoir l’innovation et la production de matériaux à très forte valeur ajoutée sans devoir gérer l’installation complète des centrales.
Cette annonce sur le solaire fin décembre, a conduit à la chute du cours de l’action Soitec (> -50%) et par conséquent à plusieurs effets particulièrement négatifs :
- La capitalisation boursière de Soitec est très faible (~ 240M€) : augmentation du risque de rachat (OPA), refinancement éventuel plus compliqué à entreprendre.
- Un nombre significatif de salariés ayant souscrit à des ABSAAR, suite aux communications et aux conditions attractives mises en place par la direction, ont aujourd’hui perdu des sommes très importantes. Au-delà des raisons idéologiques sur les dérives des marchés financiers (…), la CGT Soitec a toujours été plus que réservée concernant l’actionnariat salarial surtout que ce dispositif nécessitait des investissements de la part des salariés (≠ BCE, ≠ stocks options). Dans une période aussi difficile économiquement et alors que le pouvoir d’achat des salariés de Soitec a diminué depuis de nombreux mois (plus d’intéressement, chômage partiel…), la CGT dénonce les conséquences de ce dispositif « casino » pour les salariés dont les économies sont parties en fumée. La communication d’une probable troisième campagne pour « se refaire » prêterait presque à sourire si la casse n’avait pas déjà été aussi importante jusqu’à présent.
Pour conclure, après les mesures de réduction des coûts en 2014 pour la division microélectronique afin de « sauver » la division microélectronique de Soitec , voici maintenant en 2015 les mesures de réduction de coûts pour « sauver » la division solaire …La CGT Soitec s’interroge sur la stratégie de notre direction et demande qu’elle soit revue car les salariés des différents sites de Soitec (contacts en cours avec des représentants de Freiburg) et aussi tout le personnel de Corsica à Bernin sont très inquiets pour l’avenir de leurs emplois à Soitec….
L’histoire du solaire high-tech de Soitec victime du silicium triomphant
Par Manuel Moragues – Publié le 20 janvier 2015, à 17h38
Solaire, Photovoltaïque, Composants, sous-traitance, Semi-conducteurs, Electronique
Panneaux solaires
© D.R.
A LIRE SUR LE MÊME SUJET
L’avenir de Soitec en électronique est suspendu au choix de Samsung
Soitec réduit sa dette, confirme son objectif de marge
La photonique sur silicium dans les starting-blocks
ANALYSE Soitec jette l’éponge dans le solaire après cinq ans d’efforts et d’investissements. Les classiques panneaux en silicium, éprouvés et toujours moins chers, ont étouffé la technologie de photovoltaïque à concentration du français.
Fin de l’aventure solaire pour Soitec. Le français a annoncé lundi 19 janvier qu’il recentrait ses activités sur son cœur de métier, l’électronique, et qu’il avait « engagé plusieurs actions visant à réaliser la valeur de la division Energie solaire », selon son communiqué. En clair, Soitec abandonne le solaire. « Le solaire n’est plus le sujet de Soitec aujourd’hui », a tranché Paul Boudre, désormais directeur général à la place d’André-Jacques Auberton-Hervé, qui reste président du conseil d’administration.
La diversification stratégique lancée par l’ETI iséroise en 2009 a tourné court. « Soitec y a investi au total 400 millions d’euros », a rappelé Olivier Brice, son directeur financier, précisant que le bilan de cette aventure ne pourrait être dressé qu’après la valorisation des actifs de Soitec – la toute récente usine de San Diego en tête, dans laquelle Soitec dit avoir investi environ 170 millions. Selon Olivier Brice, les modalités de cette valorisation restent à explorer et le groupe se donne plusieurs mois pour la réaliser. Déjà, Soitec affirme avoir supprimé 100 emplois à San Diego et promet d’autres mesures de réduction des coûts. Concernant les projets en cours – essentiellement 50 MW en France – Soitec assure qu’il continuera à fournir ses clients ou leur trouvera une alternative.
ESSOR EN AFRIQUE DU SUD, CHUTE EN CALIFORNIE
Après des années d’efforts, André-Jacques Auberton-Hervé pensait, au printemps 2014, voir enfin décoller son activité dans le solaire. La mise en service de sa première centrale d’envergure, en Afrique du Sud, avait fait bondir in extremis son chiffre d’affaires dans le photovoltaïque de 6 millions d’euros en 2012-2013 à 79 millions sur l’exercice 2013-2014 (clos le 31 mars 2014), pour un chiffre d’affaires total de 247 millions. La division solaire a ensuite généré 39 millions d’euros de ventes sur les 9 premiers mois de l’exercice 2014-2015.
Las ! Cet essor a été brisé net par la perte d’un très gros contrat évalué à environ 250 millions d’euros en Californie. L’annonce, fin décembre, de cet échec avait fait chuter le cours en Bourse de l’ETI de moitié en une matinée. La poursuite de l’activité a été jugée intenable alors que le groupe avait déjà levé 400 millions d’euros via trois augmentations de capital en quatre ans pour la financer.
Ce revers californien, l’échec de Soitec dans le solaire mais aussi plus largement l’incapacité de la technologie du photovoltaïque à concentration (CPV) à percer partagent une même cause : la domination croissante du silicium. Le porteur du projet californien, Tenaska Solar Ventures, a préféré des panneaux en silicium « classiques », éprouvés et bien moins chers, à la technologie complexe et encore très peu utilisée de Soitec.
UNE TECHONOLOGIE COMPLEXE
Le principe du CPV consiste à utiliser un petit nombre de cellules solaires ultraperformantes, au rendement presque double des meilleures cellules au silicium, – constituées de semi-conducteurs III-V – bien plus chères que le silicium et sur lesquelles la lumière est concentrée (500 fois pour Soitec). Il faut en outre que ces cellules soient parfaitement orientées face au soleil, ce qui nécessite un dispositif électromécanique de suivi de notre étoile très précis et coûteux (« tracker 2 axes »). Cette technologie est bien adaptée aux grandes centrales au sol dans les zones à forte irradiation, un segment de marché en plein essor.
De nombreuses start-up se sont positionnées sur le CPV à la fin des années 2000. Le jeu était encore ouvert entre les technologies. Mais les investissements massifs de l’Asie dans la fabrication de panneaux en silicium ont changé la donne. Dopé par la chute de ses prix, le silicium s’est imposé : éprouvé à travers des dizaines de gigawatts de par le monde, il domine aujourd’hui le marché à environ 90%. Les technologies de CPV, ultra-minoritaires, complexes et peinant à suivre la chute des prix du silicium, n’ont pu rassurer les investisseurs, qui considéraient déjà le solaire comme une activité risquée. La plupart des start-up du CPV ont jeté l’éponge.
Resté en piste et bataillant sans relâche pour promouvoir sa technologie, Soitec était devenu l’un des leaders, sinon le leader mondial du secteur et était en train de réaliser l’une des plus grandes installations CPV du monde avec sa centrale sud-africaine de Touwsrivier de 44 MW. Mais c’était au prix de lourdes pertes. La perte du contrat californien n’offrait plus de perpectives suffisantes. Soitec a été vaincu par le silicium.
Manuel Moragues
Le couperet va faire son office et il se pourrait que certains jours jadis glorieux pour la seigneurie patronale s’éloignent pour laisser place à la réalité des faits et son lot sordide d’échecs, drainant dans son sillage de nombreux espoirs utopiques et irréalistes…
Tout comme l’hydre, coupez une tête…deux autres repoussent !
De fiasco en fiasco, après l’usine de Singapour, celle de San Diego !
Combien de millions gaspillés dans ces projets, tout cela au détriment des salariés, cela va t-il durer encore longtemps ?
http://www.casimages.com/i/150115074923738329.jpg